vendredi 30 mai 2008

La pestilence du Saint chrême (à 30%)


"Les nouvelles du monde renversé" - daté du 06/05/08 (1)



En 1882, un certain Friedrich Nietzsche écrivait : "Encore un siècle de journalisme - et tous les mots pueront". Cent-vingt six ans plus tard, il semblerait que la pestilence lexicale entrevue par Fred le syphillique se dégage sans trop de mal des salles de rédaction (f)rançaises.

Hier, aux alentours de 22h15, bulletin de nouvelles de France Info.

Entretien téléphonique au sujet des "huiles pures" avec ce qui doit être le président de cet improbable regroupement de producteurs d'olives et d'argan rein rein rein. Live from Agen, le lot-et-garonnais dénonce les freins entravant l'expansion mondiale de son commerce graisseux. Selon le très puriste agenais, il y aurait "des pressions de Total" (sic) qui grèveraient toute possibilité de développement de la pureté à froid. Depuis son huilerie-QG, l'interviewé balance deux trois mots sur les "scories" issues du processus de décomposition de certaines substances locales, de mon côté, j'entrevois dans la douleur ce que l'expression "sens figuré d'un mot" veut dire. "Mais qu'y a-t-il donc de si périlleux dans le fait que les gens parlent, et que leurs discours indéfiniment prolifèrent ? Où donc est le danger?" se demandait Foucault. Eh bien il est dans la voix prunesque du sieur Colza. En effet, monsieur connaît quelques hésitations relatives au douloureux concept d'oléagineux, type Krasucki expérimentant le concept de calcul labial. (2) (des milliers, des millions d' "olégin...oléaneux" dans le champ sémantique).

Il est 22h19 quelque part en France, la radio met fin à de longues années d'interrogations profondes sur le sens (supposé) de l'existence : telle une épiphanie trop longtemps attendue, un ravissement évangélique nocturne intervient, l'ouverture-au-monde par l'huile exempte de toute impureté décelable. L'extrême-onction du journalisme "à la française". La prochaine fois, le secrétaire général du saindoux tarnais révélera peut-être à l'auditeur de France Info sa Weltanschauung porcine.

Colza, tournesol, fourches, Henri K. avait la sociale-traîtrise sympathique. Au moins. Après les scories agricoles, les amis de la CFDT intéressent eux aussi la radio d'Etat : Chérèque prévoit depuis son C-15 orangé quelque mobilisation sociale because le maintien des 35 heures par Xavier Bertrand va "à l'encontre du travailler plus pour gagner plus." Selon l'auteur de Réformiste et impatient ! (sic) Sarko n'est pas assez sarkozyste. Syndiquez-vous plus pour sarkozir plus.

Il y en a qui ont visiblement bien compris la maxime liliputienne en la réinterprétant à leur bouillon gnôle/gun. Dans la police, on travaille plus -en dehors même de ses heures de service- pour buter plus. (3) Alors que l'emploi du conditionnel est curieusement absent de la terminologie journaleuse quand il s'agit des "casseurs-pas-gentils-en-manifs-qui-ont-cassé-des-vitrines", il est immédiatement appelé en renfort quand un excité de la gâchette commet quelque bévue. Hier soir, sur France Info, on pouvait entendre au sujet des deux flics parisiens une voix douce susurrer : "Ils semblaient ivres". Notons que l'esprit nuancé des journaleux france-informatifs a connu son apogée ce matin quand, dans un des bulletins matinaux, la speakerine-en-chef a oublié de préciser que lesdits flics n'étaient pas en service lorsqu' "au moins" un des deux justiciers "aurait" chaleureusement tiré sur le groupe de jeunes. (4) 2008: Dieu est mort et les mots puent toujours (le pastis ?). (5)

Donc, en France, vers 22h30, l'huile est pure, les syndicats sont flexibles, la police mitraille MAIS ! on a enfin l'explication du naufrage du Titanic. On sombre mais on sait pourquoi. Par téléphone, un nerd expert avance que si le navire s'est méchamment fracassé contre un gros glaçon atlantique, c'est parce qu'en fait ses rivets étaient pourris. Cinq longues minutes sur la métaphysique des boulons maritimes qui se concluent péniblement par cet avis grandiose : (les rivets de l'époque) "c'était bien, mais moins bien". (sic) Plus, plus, moins, moins, la rhétorique produite par France Info via ses scribouillards et ses invités râcle les abîmes.

Avis à tous ceux qui souhaiteraient faire partie de la grande confrérie des journalistes français, Sciences Po Paris a ouvert en 2004 une "école de journalisme" dans laquelle officient des esprits hautement critiques et résistants (6). Pour le gueux moyen, il en coûtera environ 500 euros par an (la "formation" dure deux ans), pour le rentier 5000 pour s'abreuver de conneries proférées par la dream team professorale : Jean-Marc Sylvestre t'explique l'économie, Etienne Mougeotte et Michelle Cotta "décryptent et mettent en perspective l'actualité politique" (sic). Avec tant de conférences, cours, séminaires troublant de subversion authentique et de déconstruction idéologique, je prévois lors du prochain scrutin relatif au nom de la promo 2008, un vote massif des étudiants en faveur de "Molotov".

Rappel : Michèle Cotta qui se fend d'un édito (ci-dessous) fait partie du groupe JLA Holding (qui selon Wikipédia) "est un groupe audiovisuel fondé par Jean-Luc Azoulay, et est issu de la scission de AB Productions en juillet 1999. Il en a repris les activités de production (...) Cette chaîne (IDF1 - éditée par le Groupe JLA, co-présidée par Cotta herself) marquera surtout le retour de Dorothée et de Jacky, Ariane et Patrick, mais aussi "d'anciens" acteurs d'AB tels que Patrick Puydebat, Laure Guibert, Lynda Lacoste et Babsie Steger à la télévision. Corbier décline cette proposition (7)." (sic)

"Chaque jour en fournit la démonstration : le journalisme n’est pas un long fleuve tranquille. Lecteurs, auditeurs, téléspectateurs, usagers du Net découvrent le monde à travers les média. Ce n’est pas nouveau. Ce qui l’est davantage, en revanche, c’est que, tandis que les révolutions technologiques ont permis l’explosion des média, le monde est devenu difficilement compréhensible sans médiation. La mission du journaliste relève donc, avant tout, d’un travail d’explication. Comment décrypter, pour le plus large public, la réalité d’un monde aux mille facettes ? Comment lui donner accès à un savoir le plus souvent détenu par quelques-uns seulement ? Comment trier, parmi les informations de chaque jour, dans tous les domaines, ce qui est essentiel et ce qui est secondaire, comment démêler le vrai du faux, comment informer sans trahir la vérité, comment la rechercher, cette vérité, librement, sans œillères ? La quête de la vérité a-t-elle des limites, l’ordre public, le confort de tous, par exemple ? Mais peut-on tout dire, et tout le temps ?"

On aime quand la courageuse ex-"journaliste"/co-présidente d'IDF1/ prof à Sciences Po réhabilite et Hilguegeu (8) et les questionnements épistémologiques liés à la pratique journalistique contemporaine.

"le journalisme n’est pas un long fleuve tranquille" : en effet c'est plutôt grâce à toi Michelle, une sombre bouillasse tortueuse.

"le monde est devenu difficilement compréhensible sans médiation. La mission du journaliste relève donc, avant tout, d’un travail d’explication. " Evidemment, le journaliste comme Sarkozy est là en "médiateur" pour t' "expliquer" en "pédagogue" que ce que tu considérais jusque là comme un système parfaitement merdique est en réalité absolument délicieux.

"Comment lui donner accès à un savoir le plus souvent détenu par quelques-uns seulement ?" En lui proposant le retour transcendantal de Dorothée, théoricienne du monde post-moderne.

"ce qui est essentiel et ce qui est secondaire" On dira "un flic qui bute du gitan", c'est une nouvelle pas très essentielle.

"sans œillères", mais avec des montures Bouygues ou Lagardère c'est beaucoup mieux.

"La quête de la vérité a-t-elle des limites, l’ordre public, le confort de tous, par exemple ? Mais peut-on tout dire, et tout le temps ?" Soyons fous, soyons bienséants.








(1) Par (l'excellent) Thibautcho sur http://ffsf.free.fr/

(2) Comme quoi, on peut soutenir la faucille, le marteau et la fourche.

(3) Rappel des faits: http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=100515

(4) L'emploi du conditionnel pour désigner telle ou telle action, c'est comme la recrudescence de la maladie d'Alzheimer dans les salles de rédaction des médias français : intermittent, mais pas tout à fait aléatoire.

(5) Ce serait faire preuve d'une grande candeur que de s'étonner de l'assourdissant silence ("retenue") médiatique entourant l'action armée des flics dans le Xème, quand on sait que la mort d'un jeune gitan dans le Sud abattu par un gendarme il y a quelques jours n'a occasionné que quelques brèves dans les principaux médias. voir http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=100431

(6) http://www.sciences-po.fr/formation/master_scpo/mentions/journalisme/index.htm

(7) Enfin une bonne nouvelle.

(8) Liane blonde probablement d'origine scandinave qui est à l'art dramatique ce que Charlie Oleg est à la musique contemporaine.

mercredi 28 mai 2008

Résection du réseau


Chain saw for bone resection (1)




Pour avoir la chance de cotiser 41,3 ans pour le fonds "bas de contension, déambulateurs et camomille", il convient au préalable d'activer autour de soi ce que les conseillers en emploi(s- qui restent) appellent (de leurs voeux) les "réseaux". Toute personne vaguement asociale demande dans un mouvement d'ignorance crasse (ou de gai non savoir) ce que la constitution d'un "réseau" veut dire.

Sélection sémantique parmi les sept principales significations du terme "réseau" dans le short Bob illustré:

Réseau: 1.Tissu à mailles très larges; filet.
2. électron. Ensemble d'éléments passifs ou actifs interconnectés formant des mailles et des noeuds.
3. zool. Bonnet (2) des ruminants.

Le réseau, c'est ce qui permet au funambule unijambiste de conserver son dernier moignon si celui-ci décide de se désolidariser du fil. Si je tombe, la maille sera réceptive.

Le réseau, ce sont les "actifs" en cordée qui fournissent l'escabeau et les tie-wraps.(3)

Le réseau, la digestion des boeufs.

Aujourd'hui, on ne peut même plus entrer par soi-même dans le royaume enchanté de l'esclavage salarié . Les tiers intronisent. Ils "témoignent". D'ailleurs ils ne sont plus ce qui sert traditionnellement à faire entrer l'air dans le trombone, mais ils sont devenus des membres actifs du "réseau". Notons qu'ils agissent toujours dans le domaine du brassage d'air mais ils produisent aujourd'hui une tout autre musique. Personnalisée, profitable. Désormais, on ne dira plus "c'est du piston", mais "le réseau a bien fonctionné". Tut tut tut. La prochaine fois qu'un cabinet de "RH" vous appelle (après trois mois d'attente et de mails de type "malgré l'excellence de votre CV (qu'on a pas lu d'ailleurs)...") je conseille chaleureusement aux "demandeurs" de se pointer avec un tuba. Mieux : fournissez-vous au préalable à la mercerie du coin en rubans et autres attaches soyeuses et confectionnez une installation portative, type tubas ou trompettes mêlés. Du vent, des pistons, ton avenir est prometteur.





Dans la ladrerie, un lacis de cons s'épuise les phalanges grumeleuses sur l'euphonium ventilé.




(1) Idée pour tous ceux qui pourraient disposer d'une arrière-boutique, d'une remise ou de n'importe quel cagibi pouvant faire office d'atelier de tut-tut-tut "création" : enchevêtrement de scies mécaniques médicales old school et légende de type "Résection du réseau/ réseau de résection". Autour de cette idée, boeuf en coupe : représentation de l'appareil digestif faisant apparaître le "bonnet" (estomac) : des petits personnages insérés dans un bonnet unique/appareil de digestion.

(2) L'herbivore dispose généralement d'une coiffe en laine de yack, non, mais d'un bonnet assurément; "bonnet" -you don't care and you're damn right- c'est le "second estomac des ruminants" (le Bob dixit).

(3) Hey les monades reliées, que vous trustiez les salons feutrés des ressources humaines ou les manifs very open-minded, vos examens de passage, votre capacité de jauge minutieuse participe du même "esprit" réseauté.